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Escapades coutelières

Voyage autour du monde à la découverte de couteaux d'ici et d'ailleurs

CPM S90V

Le S90V comme tenue de gala pour cette édition spéciale du bugout.

Le S90V comme tenue de gala pour cette édition spéciale du bugout.

Catégorie

Les premiums

Première apparition

1996

Composition
Carbone 2.3%
Chrome 14%
Molybdène 1%
Tungstène 0.4%
Vanadium 9%
Manganèse 0.5%
Silicium 0.5%
Phosphore 0.03%
Sulfure 0.03%
Micrographe
Le CPM S90V sous le microscope du dr Larrin Thomas

Le CPM S90V sous le microscope du dr Larrin Thomas

Le micrographe ci-dessus provient du blog de Larrin Thomas: Knife Steel Nerds

Propriétés
Dureté usuelle 61 HRC
Résilience(1) 2/5
Mordant du fil(2) 4/5
Tenue du tranchant(1) 5/5
Facilité d'affûtage(2) 1/5
Résistance à la corrosion(1) 3.5/5

(1) D'après les mesures expérimentales de Knife Steel Nerds

(2) D'après mon expérience empirique, étant donné les géométries de lame à ma disposition

Présentation

Initialement appelé "CPM 420V" lors de sa sortie en 1996, celui qui fut renommé "CPM S90V" en juillet 2000 est le deuxième alliage produit par Crucibles Industries (après le CPM S60V/440V sorti dans les années 80) à combiner une haute résistance à l'abrasion et un caractère inoxydable grâce à l'ajout de vanadium et à la technique de la métallurgie des poudres. Mais là où son prédécesseur affichait une résilience anecdotique et une résistance à la corrosion tout à fait symbolique, cette nouvelle formule corrige le tir et affiche l'ambition de devenir le fer de lance de l'aciériste.

Hélas, particulièrement difficile à travailler (du fait justement de son obstination à ne pas se laisser usiner), son usage en tant qu'acier de coutellerie ne restera dans un premier temps que très confidentiel, et cela en dépit des efforts consentis par le coutelier Phil Wilson pour documenter et populariser cet alliage dont il avait été l'un des premiers à deviner le potentiel.

Face au succès mitigé de sa création dans le secteur coutelier et à la popularité grandissante du BG42 concurrent, l'aciériste américain lance dès 2001 sur le marché son tout nouveau CPM S30V, dont la formule a été cette fois spécifiquement conçue pour la coutellerie. Le succès de cet alliage est tel qu'il éclipsera complètement, pour un temps, son ainé sur le créneau des couteaux haut de gamme.

Mais l'histoire ne s'arrête pas là. À la fin des années 2000, de l'autre côté de l'atlantique, un alliage autrichien lui aussi particulièrement difficile à travailler commence bien malgré lui à attirer l'attention des couteliers. Il s'agit bien sûr du M390. L'intérêt qu'il suscite est tel que plusieurs clones américains voient le jour (CPM 20CV, CTS-204P, Duratech 20CV) et qu'un véritable changement de mentalité s'opère inexorablement aussi bien chez les consommateurs que chez les industriels.

L'influence du "phénomène M390" (et de ses clones) est telle qu'au début des années 2010, les amateurs de couteaux de poche finirent par trouver tout à fait acceptable l'idée de payer un couteau deux fois plus cher, pourvu que celui-ci soit équipé de l'un de ces "nouveaux" (s'ils savaient...) super-alliages promettant un tranchant à la durée de vie améliorée.

C'est dans le contexte extrêmement favorable aux aciers tel que le S90V que celui-ci a pu faire son come-back en tant qu'alliage "ultra haut de gamme" équipant des couteaux au prix exorbitant. En 2022, l'ancêtre S90V est désormais considéré par bien des snobs métallurgiques comme largement supérieur à son successeur S30V, tandis qu'ils trouvent ce dernier passé de mode et vieillissant... Un comble!

Du point de vue de l'utilisateur, le S90V tient toutefois ses promesses: il est particulièrement difficile à affûter et l'opération demande une grande patience et/ou du matériel adapté. En contrepartie, il est capable d'endosser un tranchant dont la longévité n'est surpassée que par des aciers ultra spécialisés et parfaitement oxydables tel que le Maxamet ou le Rex 121, ou encore des alliages non ferreux comme le carbure de tungstène de Sandrine Knives.

Pour le comparer avec l'autre "super-acier moderne du début des années 2020": le M390 (sorti en 1988), on peut considérer qu'il gagne en tenue de tranchant ce qu'il perd en résistance à la corrosion. Les deux aciers sont également difficiles à entretenir et peu résilients, mais l'autrichien concède quelques points au test de coupe en échange d'une presque immunité à la rouille.

Pour l'amateur éclairé et équipé, le S90V constitue toutefois -malgré ses défaut- une curiosité qui mérite le détour, ne serait-ce que pour la durée de vie indécente des tranchants que l'on peut former avec.

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