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Escapades coutelières

Voyage autour du monde à la découverte de couteaux d'ici et d'ailleurs

Kerlapso "El Forge": la soutenance

Kerlapso "El Forge": la soutenance
En terre inconnue

C'est pas le tout de forger son premier couteau, mais une fois rentré chez soi avec sa chouette lame qui coupe, on s'aperçoit rapidement que c'est pas très pratique à trimbaler dans la poche, un couteau qui ne se plie pas!

Par chance, j'ai ramené de ce sympathique weekend quelques échantillons: des intercalaires et du G10 que j'ai savamment gaspillé en essayant de faire un manche "taktikeul" à mon KN1... Mais aussi un morceau de cuir et quelques précieux conseils pour me confectionner mon premier étui.

Nan parce que, autant j'avais une vague idée des étapes à suivre pour réaliser ma première lame par enlèvement de matière en totale autonomie, autant pour ce qui est du cuir... Je n'ai pour ainsi dire jamais approché une aiguille de ma vie! Alors oui, j'ai déjà vu des étuis. Je sais également à peu près le résultat auquel je souhaite arriver. Mais face à mon carré de cuir et mon bout de ficelle, j'avoue me sentir légèrement impuissant.

Alors pour ne pas multiplier les opportunités de faire n'importe quoi, je décide de commencer par un truc simple: un fourreau droit pour mon couteau forgé. Prenant mon courage à deux mains et mon alène de l'autre, j'attaque donc le défi qui se dresse devant moi en suivant scrupuleusement les étapes indiquées par mon formateur improvisé:

  1. Couper mon patron
  2. Marquer la ligne de couture
  3. Marquer les points le long de la ligne
  4. Percer
  5. Coudre
  6. Mouler à l'eau chaude
  7. Enduire à la cire d'abeille.

Jusque là, rien de sorcier, je devrais pouvoir m'en sortir!

Le patron

Bon, ok, j'ai merdé.

Alors que j'avais prévu, sur mon modèle papier, une languette destinée à être repliée pour former un passant de ceinture, je m'aperçois une fois le patron découpé dans le cuir que j'ai posé mon modèle à l'envers. Aussi, à moins de plier le cuir dans le mauvais sens et d'en exposer le côté doux, mon étui est désormais un modèle exclusivement gaucher...

Fort de cette capacité d'adaptation qui est la mienne, je change mon fusil d'épaule, coupe la languette à la base et prévois un trou sur le côté opposé pour y fixer une lanière de transport.

Le marquage

Autant j'ai presque réussi à marquer une ligne de couture suivant à peu près le rebord de ma pièce, autant le marquage des points à la fourchette est parti en cacahuète. Les dents de mon outil de précision n'étant pas espacées d'une manière parfaitement régulière, je m'aperçois rapidement que mes empreintes ne sont pas parfaitement équidistantes.

Boarf, je corrigerai les écarts lors du perçage.

Le perçage... enfin le début

Sur les conseils de mon maître de stage, je me dirige vers la perceuse à colonne pour faire des trous bien droits...

...Sauf que mon fourreau étant relativement étroit et le cuir particulièrement récalcitrant à se replier sur lui même, j'ai toutes les peines du monde à placer les deux couches de 3mm PLUS un martyr de la même épaisseur (pour que le fil de la lame n'aille pas appuyer directement sur les coutures) verticalement sous mon alène, montée pour l'occasion dans le mandrin.

Au bout de cinq trous, mon appareil est parti complètement en cacahuète et les trous, s'ils rentrent bien le long de ma ligne de couture, ressortent de l'autre côté au petit bonheur la chance. Il faut dire qu'avec pratiquement 1cm d'épaisseur à percer et un cuir qui refuse catégoriquement de rester bien à plat, je ne mets pas toutes les chances de mon côté.

Pour pallier au plus urgent, je décide de commencer à coudre les premiers points histoire de bien caler tout ça.

La couture... enfin de début

Et c'est parti pour les premiers points!

En dépit du bon sens et au risque de me faire conspuer par l'ensemble de la communauté coutelière, je reste sur l'idée d'utiliser une alène automatique pour faire des points droits. J'ai bien entendu l'argument disant que toute ma couture foutra le camp si un seul point me lâche, aussi je prévois d'assurer ces derniers avec un double nœud.

Sauf que putain, il faut un BAC+12 pour utiliser ce machin. Je dois m'y reprendre à trois fois pour passer mon premier point et éviter de faire des nœuds insolubles avec mon fil, façon casse-tête. A peine je pense avoir commencé à comprendre le truc, je dois déjà percer mes prochains points et faire une pause pour le diner.

Perçage et couture en alternance

A l'issue d'une dizaine de points passablement dégueulasses (notamment toute une série de boucles que j'omets de faire revenir dans l'épaisseur du cuir pour les protéger), je trouve un rythme confortable: trois trous avec un forêt de 2mm, trois points avec mon alène automatique. De fil en aiguille (et c'est bien la première fois que j'utilise cette expression au sens propre!) j'arrive bientôt au bout de mon ouvrage, juste à temps car mes doigts étaient sur le point de rendre l'âme.

Séance de Mako-moulage

"Tu le passes à l'eau chaude, mais pas trop longtemps, et puis tu lui donne une belle forme..."

Ouais, dit comme ça, ça a l'air simple. Mais en pratique, je fais ça comment? Il est 23h, je me vois mal envoyer un texto pour demander plus d'infos. Du coup ça sera sous le robinet avec le mitigeur bloqué sur la gauche. En espérant ne pas noyer mon cuir, je lui fais faire des allers retours sous le filet d'eau fumante jusqu'à ce qu'il me semble disposé à prendre une forme.

Je pince le fourreau tout le long de la lame et m'efforce de lui faire épouser le profil du manche, les choses ne se passent pas trop mal mais j'ai quand même l'impression d'avoir noyé mon cuir. Il sera quitte pour passer la nuit à sécher.

Et le meilleur pour la fin

Dès le lendemain midi (nan parce que je bosse un peu aussi le matin, faut pas déconner) j'entreprends de traiter mon bel étui à la cire d'abeille...

Voilà voilà.

Sauf que pour l'instant, la cire d'abeille ressemble à une plaquette de beurre qui n'a pas l'air décidée à se ramollir et encore moins à s'étaler... DE LA CHALEUR! Il faut que fasse fondre le bazar! Je découpe donc un petit carré que je place dans une casserole pour liquéfier la précieuse matière organique.

L'auteur a l'immense douleur de vous faire part du décès de sa casserole "Cassy".

Ils ont partagé de belles années ensemble depuis qu'il l'a adopté peu après s'être installé dans son premier appartement. Hélas, elle nous a quitté brutalement à la suite d'un terrible accident de cuisson, étouffée sous une impitoyable couche de cire brûlée.

Cassy, nous ne t'oublierons jamais.

Après avoir  enduit le fond de ma casserole d'une fine couche de cire brûlée dont je ne suis pas sûr de pouvoir un jour me débarrasser, je réussis à obtenir suffisamment du précieux liquide pour traiter mon cuir. Sauf qu'à peine imbibé sur le papier essuie-tout que j'avais prévu pour l'étaler, celui-ci se solidifie.

Je change donc mon fusil d'épaule et tente de verser la cire liquide directement sur l'étui. Celle-ci forme dès son atterrissage de belles gouttes de cire solide qui n'ont pas l'air davantage décidée à pénétrer le cuir. A court d'options, je passe mon étui moucheté de gouttes de cire solide directement sur la flamme de la gazinière.

Enfin, la cire se liquéfie à nouveau et semble pénétrer le cuir, qui de son côté brunit dangereusement sous l'effet de la chaleur. Je prie pour que mes fils ne crament pas et renouvelle l'opération jusqu'à ce qu'une combinaison de chauffes et d'essuyages fasse disparaître les plus grosses traces de cire excédentaire.

Après avoir transpiré un bon coup, me voilà avec un étui à l'aspect mal dégrossi, mais apparemment prêt à affronter le monde extérieur.

Les photos, les photos!
Il n'y a pas de quoi être fier... Et je ne le suis pas.
Il n'y a pas de quoi être fier... Et je ne le suis pas.

Il n'y a pas de quoi être fier... Et je ne le suis pas.

Et si c'était à refaire?

Ben en fait la question ne se pose pas: c'est à refaire! Parce que j'ai quand même un KN1 (dont les plaquettes sont en train de macérer dans l'huile de lin) à habiller.

Du coup, quels sont les résolutions que cette première expérience m'ont amenées à prendre pour ma prochaine tentative? Elles sont nombreuses:

  1. Mieux marquer ma ligne de couture, plus large et profonde.
  2. Trouver un meilleur outil pour marquer mes points.
  3. Percer les trous en simple épaisseur et prier pour qu'ils s'alignent lors de l'assemblage.
  4. Faire un nœud à chaque point et bien les faires rentrer dans la couture.
  5. Mouler à la vapeur plutôt qu'à l'eau chaude.
  6. Faire fondre et pénétrer la cire d'abeille au chalumeau.

Et si avec un peu de chance, tout ça m'aide à galérer un peu moins la prochaine fois, c'est que je suis sur la bonne voie!

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