24 Janvier 2022
Rien de spécial au programme ce lundi, alors je retourne m'enfermer dans mon garage pour voir ce sur quoi je pourrais avancer.
La lame ne bougera plus jusqu'à son retour de cuisson. Check. La quincaillerie ne pourra être ajustée qu'une fois la lame finalisée. Check. Le manche... Et bien je peux toujours commencer quelques essais!
Mes plaquettes découpées et percées, j'utilise une mèche de 10 et un calage de profondeur pour créer l'espace destiné à accueillir les têtes de vis.
De cette façon, je pourrai fixer les plaquettes sur ma soie "comme pour de vrai" afin de contrôler régulièrement l'avancement des travaux.
Pour commencer, je travaille les plaquettes séparément de la soie. J'entreprends de détourer la silhouette du manche à la meuleuse, en utilisant un disque de décapage à lamelles, mais mon outil me lâche au bout de quelques secondes! Le disque tourne toujours mais l'appareil fait un vilain bruit de crécelle et des étincelles jaillissent du bloc moteur. Dans le doute, je me rabats donc sur la bonne vieille technique manuelle.
Après avoir délimité la silhouette (plus un bon millimètre de marge), je commence le travail de volume. Toujours sur la plaquette seule. A ce stade, je prends un risque car un coup de lime mal placé pourrait enlever trop de matière et laisser la soie à nu. Je progresse donc avec le plus grand soin.
Le gros du travail effectué, j'installe mes plaquettes pour constater le résultat.
Après avoir démonté mon couteau une nouvelle fois, je commence par réaliser la garde de la seconde plaquette. Le fait de travailler loin de la lame évite ainsi tout risque d'en abimer l'émouture ou les flancs.
La garde sculptée, je décide cette fois de tenter une nouvelle approche en réalisant le reste du manche directement sur le couteau monté. Cette méthode me permet d'éviter de retirer accidentellement trop de matière, tout en prenant cependant le risque de rayer la soie d'un coup de lime trop enthousiaste.
Le côté très intéressant de cette technique, c'est que je vois le couteau véritablement surgir de la matière à mesure que je progresse vers le pommeau.
Mon futur manche complètement dégrossi, je fixe cette fois le couteau dans l'étau par la lame (en protégeant cette dernière entre deux morceaux de cuir épais) et utilise une bande de tissu abrasif pour commencer un travail de polissage.
A mesure que les marques de lime s'estompent, de subtils motifs apparaissent sur le bois. Nous sommes encore loin du résultat final et mon manche est beaucoup trop épais pour être acceptable en l'état, mais ce travail préparatoire me permet d'imaginer avec encore plus de précision l'aspect qu'aura la pièce une fois terminée.
Pour la finition de la garde, je démonte une nouvelle fois les plaquettes et les assemble directement entre elles, afin de m'assurer d'un rendu parfaitement symétrique.
Le temps de donner encore quelques petits coups de papier abrasif et le prestataire que j'ai contacté pour réaliser le traitement thermique me fait parvenir sa réponse.
Le devis est conforme à mes attentes et ma lame fera l'objet des soins les plus attentionnés avec notamment un traitement cryogénique avant revenu. Si les instructions du métallurgiste sont respectées, cela devrait lui offrir une dureté de l'ordre de 62 HRC.
Ma décision prise, je prépare ma création pour son expédition imminente, mais pas sans avoir pris le temps de lui adresser des adieux en bonne et due forme.
Sans plus attendre (mais ai-je déjà fait preuve de patience depuis le début de cette aventure), j'emmaillote mon bébé dans une épaisse couche de papier et de carton, avant de le glisser dans une boite avec mon bon de commande et mon règlement.
Il est un peu moins de 16h30, nous sommes lundi. Le bureau de poste le plus proche n'est donc pas encore fermé pour le weekend. Je me précipite vers le guichet et abandonne là ma création, pétri d'angoisse à l'idée des innombrables désagréments qu'elle pourrait subir au cours de ce voyage.
Je m'efforce toutefois de rester optimiste: Si tout va bien, d'ici une vingtaine de jours, je pourrai enfin reprendre l'émouture, les finitions de surface et terminer le manche avant de passer à l'affûtage final. Et d'ici là, je n'aurai qu'à reprendre la rédaction de mes articles habituels en attendant.
Alors à la prochaine.