30 Novembre 2021
Salut, voyageur couteauphile, et bienvenue pour une étape comme on les aime: le genre qui respecte la structure habituelle de mes articles et où on s'en donne à cœur joie pour démonter la création improbable d'un designer sadique.
Aujourd'hui, nous partons pour les États-Unis d'Amérique à la rencontre d'une entreprise baptisée "S.O.G." en référence à l'unité militaire américaine "Study and Observation Group" qui a opéré durant la guerre du Vietnam.
Fondé en 1986 par Spencer Frazer, la marque commence par produire des répliques commémoratives du modèle de poignard Bowie utilisé spécifiquement par ces unités spéciales puis, face au succès commercial de ses productions, diversifie progressivement son offre.
Résolument orientée vers un public de militaires et de collectionneurs d'armes à ses débuts, la marque s'est progressivement mise à produire des couteaux de poche et des outils multifonctions pour les amateurs de grands espaces et les explorateurs urbains. Loin de tourner le dos à ses origines, le catalogue "civil" de SOG est saturé de modèles dotés d'une indéniable touche "tactique" qui n'est pas pour déplaire à un certain public.
L'artefact dont il est question aujourd'hui a été baptisé "Vulcan" par son créateur en hommage au canon M61 Vulcan, mitrailleuse hexatube de 20mm de calibre capable de tirer jusqu'à 6000 coups par minute. Conçue en premier lieu pour équiper les avions de combat, cette semeuse de mort littéralement capable de couper une maison en deux en l'espace d'un battement de cil illustre à la perfection toute la subtilité et le raffinement dont est capable l'humain lorsqu'il s'agit d'anéantir ses semblables.
A de nombreux égards, on peut dire que cette finesse se retrouve dans le couteau éponyme qui, sous des apparences de pliant presque civilisé, peine à cacher ses intentions belliqueuses.
Introduit sur le marché en 2008, le Vulcan est présenté au grand public en deux déclinaisons: une version "tanto" ouvertement conçue pour "l'autodéfense" (comprenez: satisfaire le besoin viscéral de faire saigner son prochain) avec sa géométrie faite pour perforer; et une version "classique" au profil plus polyvalent mais néanmoins original.
Ce profil "tanto" librement inspiré de la dague japonaise éponyme ne laisse que peu d'ambiguïté quand aux intentions d'une telle lame.
Durant leur période de production, les deux déclinaisons de ce modèle étaient réalisées (comme c'était à l'époque le cas pour tous les modèles haut de gamme de leur catalogue) en sous-traitance dans la ville coutelière de Seki au Japon par l'entreprise G. Sakai, également connue pour être un fournisseur récurrent des marques Gerber, Al Mar ou encore Spyderco.
Rétrospectivement, je me demande encore les raisons précises qui m'ont fait acquérir cette monstruosité. Était-ce l'indéniable originalité des courbes de sa lame, l'envie de découvrir l'acier VG10 tel qu'il est travaillé dans son pays d'origine, ou encore une simple erreur de jeunesse? Toujours est-il que j'ai ajouté la version "civile" à ma collection au cours de l'année 2017.
L'acier laminé au cœur de VG10 me faisait évidemment de l'œil, mais l'agressivité exubérante du profil tanto qui bénéficie de cette finition était définitivement éliminatoire, même en pleine période de craquage. Je me suis donc rabattu sur un "simple VG10" au profil de lame assagi.
Bien qu'elle incarne la version "utilitaire" du Vulcan (par opposition au profil "combat" de la déclinaison tanto), cette lame n'en conserve pas moins un profil très dynamique et original.
Longueur | 89mm |
Longueur de coupe | 82mm |
Hauteur | 27.5mm |
Épaisseur | 4mm |
Épaisseur derrière le fil | 0.8mm |
Angle d'émouture primaire | 6.51° |
Type d'émouture primaire | Creuse |
Matériau | VG10 |
Dureté* | 60 HRC |
(* données constructeur)
Par où commencer... Il y a tellement à dire sur ce morceau de métal aux dimensions généreuses! Le plus simple est sans doute de commencer par l'acier qualitatif dont il est constitué et qui lui procure une bonne dureté et une finesse de grain relativement élevée au détriment de la résilience.
Ces qualités rendent possible la création d'un fil au mordant très agressif dont l'entretien est hélas rendu acrobatique par la combinaison d'un convexe prononcé à sa base, d'un ergot d'ouverture aussi superflu que mal placé (ne le cherchez pas sur les photos, je l'ai démonté dès la première utilisation), et d'une garde largement proéminente.
Et là, tu te démerdes tout seul pour affûter ton couteau pliant de survie. Et le casse-goutte n'y changera rien!
De façon remarquable, le dos de la lame accuse un concave similaire qui procure à l'ensemble une certaine symétrie et un profil général en forme de feuille qui n'est certes pas désagréable, mais dont l'utilité reste incertaine.
L'émouture concave pratiquée par le coutelier japonais constituerait certainement un atout si elle avait été plus resserrée: à l'attaque de l'émouture secondaire, les deux côtés de la lame sont certes presque parallèles, mais toujours écartés de pratiquement un millimètre. Résultat des courses, le couteau conserve une quantité impressionnante de matière derrière le fil et ne pénètre qu'à contrecœur dans la matière. Phénomène aggravé par l'angle de plus en plus obtus qui se présente à mesure que l'on y progresse, ainsi que l'épaisseur totale importante que cette lame atteint très (trop) vite en raison de la bassesse de son émouture.
En définitive, mis à part un aspect avantageux, ce choix de géométrie n'apporte lui non plus pas réellement de bénéfice au couteau. Au même titre que les trois rainures pratiquées à la base du dos de la lame, qui n'ont vraisemblablement pour seul but dans l'existence que d'accumuler la crasse et favoriser la corrosion.
Un prix spécial sera offert au lecteur qui saura m'indiquer dans les commentaires à quoi servent ces trois rainures.
Et puisqu'il est question de la base du dos de la lame, pourrait-on s'il vous plait me présenter le monstre psychopathe et sadique qui a jugé utile de dessiner une arête vive et limite affûtée à l'endroit EXACT où la pulpe du pouce vient appuyer lorsque l'on tente de prendre ce couteau en main? Nan parce que juste là, comme ça, j'ai terriblement envie de la lui coller où je pense son arête vive.
Dans de nombreux pays, il y a des lois contre ce genre de protubérance perverse. Le genre de loi qui condamne le coupable à une castration chimique bien méritée.
Sans déconner, il y avait une bonne dizaine d'endroits où il aurait pu la mettre sans que ça ne dérange personne, sa protubérance gothique, mais NON, il a fallu que môssieur choisisse le pire spot du monde. Guidé par l'ergonomie désastreuse du manche (mais ça, nous en reparlerons dans un instant), le pouce prend systématiquement appui à cet endroit précis dès que l'idée de s'adonner à une coupe droite germe dans le cerveau de son propriétaire. Et même en faisant pivoter le couteau d'une manière particulièrement maladroite ou en approchant son index dangereusement près du fil pour avancer son appui jusqu'au concave situé plus loin, on sent toujours cette pointe douloureuse à la base du pouce.
Je ne sais pas pour les masochistes, mais en ce qui concerne les gens ordinaires c'est le genre de critère qui s'avère particulièrement dissuasif lorsqu'il s'agit d'utiliser un couteau.
Non, même comme ça, ça pue l'ampoule à plein nez...
Il ne reste donc comme option que celle d'aller chercher refuge plus en recul sur le manche... Et c'est là que tout le génie du créateur de cet accessoire de torture digitale apparaît au grand jour.
Longueur | 122.3mm |
Hauteur | 28.4mm |
Épaisseur | 17mm |
Platines | Acier inox |
Plaquettes | FRN (Fiber Reinforced Nylon) |
D'habitude, quand on tombe sur un manche de plus de 12cm de longueur, on pense deux choses:
Avec le Vulcan, on n'a qu'à moitié raison: ce couteau est bel et bien trop encombrant pour être agréable dans la poche. Par contre, pour la question du confort, il faudra repasser car ce manche aligne les aberrations ergonomiques les plus scandaleuses.
Commençons par le revêtement en Nylon renforcé à la fibre de verre, qui bénéficie ici d'une finition de surface n'étant pas sans évoquer une râpe à cors. Question adhérence, rien à dire: on est servi. En revanche, à moins d'avoir des cals sur les mains et de vouloir les retirer, l'usage de gants est fortement recommandé.
L'usage des gants, justement, c'est la première chose qui vient à l'esprit lorsque l'on inspecte l'encoche destinée à héberger l'index. Incroyablement large, au point qu'à moins de porter des gants de chantier on ne sait pas vraiment où placer son doigt.
Nan mais pour de vrai, je suis supposé le mettre où mon doigt? (Attention, ne prononcez pas cette phrase hors de son contexte))
Elle est en outre garnie d'une double rangée de dents spécialement découpées dans les platines pour martyriser l'imprudent doigt qui aurait l'audace de s'aventurer nu sur cet espace.
Idem pour le majeur, qui bénéficie de sa propre découpe, histoire de bien retirer toute liberté de positionnement à l'utilisateur, et qui nage littéralement au fond de sa baie sans trop savoir de quel côté se caler. La bonne nouvelle, c'est que l'emplacement du majeur est tellement en retrait qu'au moins l'index n'a pas d'autre choix que de se caler à l'arrière de son propre rangement.
Et quitte à terminer ce tour du propriétaire mal loti, on peut causer de l'annulaire, lui aussi hébergé dans sa propre encoche décidément très en retrait, et de l'auriculaire, condamné par la translation des doigts qui le précèdent à reposer sur l'extrémité du pommeau.
Mais, et c'est là où le génie du créateur dépasse toutes nos attentes, cette extrémité de pommeau est délibérément constituée par l'extrémité saillante des plaquettes dénuées de tout enrobage. Et oui, deux fines lamelles de métal à peine plus épaisses que la base de l'émouture secondaire de la lame, découpées en pointe et fièrement évidées des lettres S. O. G. signifiant ici "Surement et Outrageusement Gênant"
On serait tenté de croire que l'on vient de mettre le doigt sur la quintessence du mauvais goût, mais c'est sans compter sur le sort réservé à la paume et au pouce de l'utilisateur.
Du côté de la paume en effet, un clip de poche particulièrement proéminent (en plus d'être affublé d'autres tares qui feront l'objet d'un chapitre dédié et ultérieur) s'enfonce avec hargne dans la peau du malheureux qui tente de serrer ce couteau entre ses doigts.
Il ne rechigne pas non plus à se balader de haut en bas au gré des mouvements de la main, histoire de rappeler sa présence à tout instant et de distiller, grâce à sa conception a géométrie variable, un indicible sentiment de produit mal fini.
Et pour le pouce... Ah, le pouce... Nous n'avons fait qu'effleurer l'ampleur de son calvaire dans le chapitre dédié à la lame car, juste en arrière de l'arête qui l'y attend, se trouve une pseudo rainure dans laquelle on serait tenté de prendre appui. Sauf que celle-ci aussi est garnie de dents acérées et se termine par une seconde arête certes moins vive que la première mais tellement proche de celle-ci que l'on n'a d'autre choix que d'appuyer en plein dessus.
À force, je ne vais plus avoir de pellicule pour photographier tous les défauts de conception de ce couteau...
En définitive, la seule façon de trouver un appui confortable à la fois pour le pouce et pour les trois premiers doigts (parce que l'auriculaire et la paume sont condamnés de toutes façons, fais-toi une raison et passe à autre chose), est d'adopter une prise très en recul, qui déséquilibre complètement le couteau et dans laquelle on ne peut pas réellement exercer de levier efficace pour une coupe droite.
À la limite, là, on ne sacrifie que son petit doigt, un bout de paume, et 90% de sa puissance utile...
Pourtant j'ai tout essayé au cours de la semaine d'usage exclusif que je me suis imposé avec cette sombre merdegonomique.
J'ai tenté la préparation alimentaire: lame trop épaisse, longueur utile réduite à peau d'zob à cause de la garde trop profonde et du concave à la base du fil. J'ai essayé de manger avec: trop lourd, trop maladroit. Éplucher une pomme? Impossible, l'arête au dos de la lame blesse l'index qui tente de prendre appui sur son dos. Resserrer une vis? Ah là oui! Le méplat pratiqué sur les flancs de l'articulation se révèle plutôt sympathique pour pincer la base de la lame entre ses doigts. Mais bon, ça fait quand même cher pour un tournevis pas vraiment plat.
Toutes les autres positions que celle illustrée ci-dessus mènent d'une façon ou une autre à placer une excroissance quelconque, qu'elle soit située sur le dos ou sur le ventre du manche, à un endroit où elle n'est pas la bienvenue. Ce qui soulève la question: mais à quoi peut bien servir cette unique position presque acceptable et aussi délibérément imposée à l'utilisateur? La réponse est tristement évidente lorsque l'on se remémore que ce couteau a également été réalisée avec une lame au profil tanto conçu pour perforer... Ce manche est spécifiquement étudié pour apporter un maximum de confort lorsque l'on souhaite faire des trous dans le ventre des gens sans se salir les doigts.
Cette orientation fonctionnelle, en inadéquation totale avec ma perception de l'objet en tant qu'outil, vaut à ce manche une sanction éliminatoire sans possibilité de rattrapage à la fin de l'année. Je m'abstiendrai donc de tout commentaire supplémentaire, qu'il soit relatif à son esthétique (dégueulasse), la qualité (déplorable) de ses matériaux et finitions, ou encore sa résistance (inexistante) à la flexion.
En outre, n'étant pas utilisateur des orifices passe-lanière pratiqués sur les couteaux de poche, je ne suis pas en mesure de m'exprimer sur ce qui constitue peut-être le seul détail correctement conçu de ce manche.
Le mécanisme de verrouillage qui équipe le Vulcan constitue indéniablement un élément positivement remarquable de ce couteau, mais il est hélas noyé sous une prolifération illisible de modalités d'ouverture toutes plus inefficaces les unes que les autres.
Pour comprendre ce qui est sur le point de se passer, il faut intégrer l'idée que la lame du Vulcan n'est pas retenue en position fermée par une détente comme c'est le cas lorsque le couteau est équipé d'un liner lock ou d'un frame lock. Au lieu de cela, c'est le pivot de son Arc Lock et la tension du ressort auquel il est fixé qui empêche cette dernière de s'ouvrir sous l'effet de son propre poids.
Or si ce mécanisme empêche effectivement la lame de s'ouvrir, l'effet de maintien qu'il crée n'a rien à voir avec une détente qui -lorsque sa résistance est vaincue- libère la lame d'un coup. Ici le ressort continue de ramener la lame vers l'arrière pendant presque un quart de sa course, suite à quoi le mécanisme se contente "simplement" de freiner outrageusement le mouvement.
Et donc jusqu'à ce stade précis (où le flipper a déjà disparu dans le manche), la lame veut se refermer toute seule. Ensuite, elle ne veut juste pas s'ouvrir.
Et comme ce genre de comportement visqueux est complètement incompatible avec les modes d'ouverture tels que le flipper ou la pichenette sur l'ergot de pouce, le Vulcan a été équipé pour son ouverture... D'un flipper et d'un ergot de pouce. Et pas de n'importe lesquels en plus!
Le flipper est tellement petit qu'il disparait dans le manche avant même que la lame ne cesse de vouloir retourner dans son rangement, ce qui le rend tout simplement inutilisable à moins d'être doté d'un coup de poignet aussi vigoureux que précis.
L'ergot n'est pas davantage digne d'éloges: inutilement proéminent et placé de façon à gêner au maximum pendant la coupe et l'affûtage, j'ai tout simplement retiré celui qui se trouvait sur mon exemplaire (raison pour laquelle tu ne le voies pas sur les photo et qu'à sa place il ne reste qu'un trou circulaire). Et comme si cela ne suffisait pas, il est non seulement impossible à exploiter sous la forme d'une pichenette en raison de la résistance farouche opposée par l'Arc Lock et de son positionnement désastreux, mais son débattement exige également -lorsqu'on souhaite l'accompagner d'un bout à l'autre de sa course- d'être muni d'un pouce de 25cm (ce qui n'est pas mon cas, je le confesse).
Quant à l'ouverture à deux mains, inutile d'y penser: la contre émouture pratiquée sur le dos d'une lame qui déjà ne dépasse pas des masses du manche lorsqu'elle est repliée rend l'opération singulièrement délicate.
La seule manière véritablement efficace d'ouvrir ce couteau est donc celle qui n'est suggérée nulle part: libérer le mécanisme de l'Arc Lock et laisser faire la gravité (ou la force centrifuge, pour ceux qui ont un coup de poignet bien entraîné par des années de solitude).
Dans tous les cas, la charnière finit tant bien que mal par laisser la lame se déplier et le verrouillage peut finalement s'engager.
Ce mécanisme est d'une robustesse remarquable et parfaitement ambidextre, en plus d'être facile à libérer. Autant de points clairement positifs... Que SOG n'a pas oublié de gâcher avec un flipper tellement mal conçu qu'il vient frotter contre l'axe du mécanisme et empêche la lame de se refermer complètement une fois le verrouillage libéré.
Arf, c'est ballot, si près du but...
Si tout ce qui brille n'est pas d'or, tout ce qui se plie et possède un clip de poche n'est pas nécessairement portable non plus.
Doté de dimensions non négligeables et d'un poids supérieur à la moyenne, le Vulcan ne se laisse pas facilement oublier sur le rebord de la poche. En outre, on peut tout de suite faire l'impasse sur le facteur d'acceptabilité sociale de la chose: il existe peu de gens aussi naïfs que moi et capables de penser que ce couteau est fait pour autre chose qu'agresser son voisin.
Mais ce qui mérite vraiment le détour lorsqu'il est question de transporter ce couteau avec soi, c'est son clip de poche profond ambidextre et pointe en haut. En plus d'être particulièrement ignoble avec sa forme de spatule et ses trois triangles évidés, il présente la particularité remarquable (en plus d'avoir été spécifiquement étudié pour faire le plus mal possible à la main de son propriétaire) d'être fixé d'une manière tout à fait unique: glissé dans une fente pratiquée au cul du manche et manifestement trop grande pour lui, il n'est retenu que par une unique vis.
Il en résulte un accessoire qui se déplace d'un bon centimètre sans la moindre difficulté.
Rock and Roll, baby!
Aussi déstabilisante lorsqu'on porte le couteau que lorsqu'on l'utilise, cette géométrie variable n'inspire définitivement pas le sentiment de qualité que l'on attend d'un couteau qui se veut "à toute épreuve".
En outre, son extrémité exagérément saillante ne se contente pas d'être extrêmement inconfortable lorsqu'elle est en contact avec la paume de la main, elle représente également une menace pour tout ce qui passe à sa proximité lorsque le couteau est supposé être rangé et inoffensif sur le rebord de votre poche. A titre d'exemple, évitez de passer trop près de votre voiture avec cet accessoire sur vous: la peinture de votre portière vous en saura gré.
En dépit donc d'un bel effort pour compléter le caractère ambidextre du mécanisme d'articulation, on ne retient des modalités de transport de ce couteau que le fait qu'il vaille mieux le laisser à la maison.
Et c'est là que ça devient vraiment hilarant...
Parce que lâcher 220 balles (tarif hors promotions, dieu merci je l'ai eu en déstockage!) pour un objet aussi mal conçu, et réalisé dans des matériaux aussi banals, il faut mieux réussir à en rire.
On ne peut évidemment pas reprocher à G. Sakai d'avoir été frileux avec les finitions (oh la vache, j'ai eu du mal à la placer celle là!). Au vu du design complètement pété qui a été soumis au constructeur japonais, on peut même considérer qu'il a fait de l'excellent travail: les ajustements sont bons, l'émouture est symétrique et son concave exécuté proprement à défaut d'être suffisamment convergent, la finition satinée est homogène... Non, il n'y a vraiment rien à redire concernant le soin dont cette pièce a fait l'objet.
Si arnaque il y a, elle vient bel et bien des États-Unis car afficher un tel billet pour des matériaux dignes d'un couteau à 80€ (et encore...) et y associer un design expédié par dessus la jambe qui accumule les erreurs triviales, c'est clairement du vol.
Je concède avec plaisir le fait que le VG10 est un acier qualitatif. Néanmoins, on le trouve sans difficulté sur des couteaux à moins de 100€, et associé avec d'autre chose qu'un manche en plastique. Sans doute extrêmement robuste, le nylon manque clairement de rigidité et le flex du manche s'en ressent: d'une simple pression sur ses flancs, il est possible de faire frotter les platines contre la lame... Pas classe pour un couteau qui flirte avec les tarifs du haut de gamme. Et cette souplesse se retrouve jusque dans la charnière, qui accuse un jeu latéral d'autant plus indigne de cette gamme de prix que le couteau affiche par ailleurs des dimensions et un poids qui le classent parmi les "robustes" du marché.
Et que dire des aberrations ergonomiques et pratiques qui pullulent où que l'on porte le regard. La découpe du manche, le choix de sa texture, les platines en forme de scie sous les doigts et saillantes au pommeau, les contours inexplicables de la lame, le clip branlant... Franchement, est-ce que ça aurait coûté cinq minutes de R&D pour penser à y mettre une deuxième vis pour éviter qu'il ne se balade d'un bout à l'autre du manche? Même pas! Mais visiblement la R&D pour ce modèle s'est résumée à coller une horde de macaques sous ecstasy dans une pièce avec un tableau Velléda et une boite de crayons de couleurs.
Non, sérieusement, ne vous approchez pas de ce couteau, c'est une sombre merde inutilisable.
Ah, ça fait quand même du bien de se lâcher une fois de temps en temps! En cherchant bien, j'aurais certainement pu trouver quelques points positifs au sujet de ce Vulcan, mais ça n'était clairement pas l'objectif du jour. Parce qu'il y a des fois, comme ça, où un couteau ne mérite tout simplement pas qu'on lui fasse de cadeaux.
Je te rassure, toutes les étapes ne seront pas aussi décapantes, et le prochain numéro sera d'ailleurs pour nous l'occasion de découvrir un modèle pour lequel j'ai beaucoup plus d'affection, une pièce vraiment atypique sortie de l'esprit fou d'un designer anonyme et qui, je l'espère, saura susciter ton intérêt.
Alors à la prochaine.